[ALBUM DE LA SEMAINE] Benjamin Epps – L’Enfant Sacré De Bellevue

L’album de la semaine :

Benjamin Epps« L’Enfant Sacré De Bellevue »
(2025, Mocabe Nation)

« J’ai battu Central comme Killer Mike a battu Travis. » (Track #2, Le Message).

C’est avec cette phase que Benjamin Epps me permet d’introduire son dernier album et plus globalement sa carrière, restant encore trop peu connue du grand public. Il gagne pourtant en 2022 le BET (Black Entertainment) Hip-Hop Awards du « Meilleur Flow International » face à Central Cee (UK), entre autres. Il dépasse ainsi des gros noms comme MHD, Jok’air, ou encore Aya Nakamura, nominé.e.s les années précédentes mais n’ayant jamais remporté le prix en tant qu’artiste francophone.

Benjamin Epps – Le Message

Benjamin Epps est né au Gabon, et a vécu la plupart de son enfance dans le quartier de Bellevue, à Libreville, la capitale gabonaise. On en comprend alors un peu mieux le titre, dans lequel il s’érige en « Enfant Sacré ».

Et pour cause, il était « Le Dernier Garçon » de sa famille, le dernier-né après plusieurs sœurs et frères. À sa naissance, sa grand-mère a « monté une cérémonie pour remercier tous [leurs] ancêtres d’avoir fait un dernier garçon ». Il raconte également dans le morceau d’introduction « qu’ils ont allumé les torches, fait des incantations ».

Benjamin Epps délivre dans le titre « Le Dernier Garçon » l’histoire touchante de son enfance, évoquant notamment l’absence de son père, les galères avec ses potes, le décrochage scolaire… Des sujets assez récurrents finalement dans le paysage du rap, mais qu’il dépeint avec une sincérité et une plume qui nous percute, tant musicalement qu’émotionnellement.

Benjamin Epps – Le Dernier Garçon

« IAM disait qu’demain c’est loin, moi j’peux t’assurer qu’aujourd’hui l’est plus. » (Track #2, Le Message)

Digne héritier des grands noms des générations passées du rap francophone, tant sur le style que sur le fond, il connait ses classiques : IAM, Abd Al Malik qui intervient et le présente tel un roi dans un morceau d’introduction magistral, ou encore Lenny Kravitz, pour changer de registre.

Il a plus récemment collaboré avec MC Solaar, véritable pilier fondateur du rap francophone, sur le titre « Bénédictions » extrait du dernier album de Solaar : Triptyque : Balade astrale, sorti en décembre dernier.
« J’suis avec Claude et j’ai du mal à réaliser » s’exclamait-il.

Le flow et les prods sur lesquelles pose Benjamin Epps sont en grande majorité old-school, disséminées de samples et de beats boom-bap. La force de son rap réside néanmoins, à mon humble avis, dans son art de déclamer, sa prononciation précise des mots, et évidemment une écriture poétique, vraie, et pleine de références culturelles et personnelles. Il n’hésite pas à également tacler grâce à des punchs monumentales, à la manière d’un Alpha Wann, ou bien de faire du bon vieil ego-trip comme sur le dernier titre « Spect’« .

Benjamin Epps – Spect’

Le titre que j’ai préféré c’est « Le Jeune Moi » (tous les titres ne commencent pas par « Le… », promis, mais il y a peut-être une volonté par-là de raconter une histoire, la sienne, en chapitres comme dans un roman). « Le Jeune Moi », c’est un son où il nous raconte ses remords et ses regrets face à sa jeunesse parfois malheureuse, parfois innocente et joyeuse.

Benjamin Epps – Le Jeune Moi

On ne retrouve qu’un seul featuring sur l’album (mis-à-part Abd Al Malik sur l’intro), sur le titre « Shoe Box » avec Conway the Machine, rappeur américain, montrant au public son internationalisation, lui qui vient du Gabon, et qui parle la deuxième langue mondiale du rap.

Dans le début du titre « La Fayette », le flow de Benjamin Epps m’a directement fait penser au refrain du titre « Praise The Lord » d’A$AP Rocky et Skepta. Référence ou simple hasard ?

Finalement, Benjamin Epps maitrise son art à la perfection dans « L’Enfant Sacré De Bellevue » et nous montre qu’il peut toujours devenir meilleur, même après avoir gagné un BET Award !

Bonne écoute !

Arthur

Auteur/autrice : Arthur

Service Civique à Béton - en charge de RadioDJ.