MAD FOXES – Inner Battles
El Muchacho Records – 02/02/2024
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Ashamed ou comment faire mieux ? Oui, le 2eme album des Mad Foxes a fait du bruit, beaucoup de bruit dans le paysage du rock indé. Le trio nantais a fait office d’outsider à la sortie de ce disque furieux. Album qui s’est même permis un petit voyage du côté des US pour finir sur le plateau d’un certain Jimmy Fallon (rien que ça). On peut le dire, le groupe peut fièrement affirmer qu’il fait parti des grands noms de la scène française au côté de Lysistrata, des MNNQNS ou encore des Psychotic Monks.
Mais après plusieurs années à avoir vadrouillé et promu son rock bien anglais, est-ce que les 3 renards peuvent-ils surprendre encore ?
En guise de réponse, un 3eme album du nom de Inner Battles. Il est dit comme « le fruit d’un processus créatif profondément introspectif ». Mais avant de parler profondément de musique, parlons des personnes qui permettent déjà de faire un bon skeud.
Ashamed avait mis la barre haute en terme de production et ce grâce à un acteur : Christophe Hogommat. Quand il n’est pas occupé à composer des musiques pour une certaine boite de triple A française (ça commence par Ubi, ça finit par Soft), il se permet d’accueillir quelques groupes pour en proposer des albums complètement bangers. C’est très simple, Christophe aime les productions coups de poings et ça tombe bien, les Mad Foxes sont des experts pour distribuer des mandales. Forcément, il se devait d’être de la partie en enregistrant le 3eme album de ces joyeux compères. Néanmoins, un nouveau challenger qu’on avait pas vu venir s’est occupé du mixage, un certain Joris Saïdani (Birds In Row, ça vous dit quelque chose ?). Mad Foxes propose de la musique à jouer sur scène et ce qui permet de dire que le mixage est réussi vient du fait que les yeux fermés, les oreilles dans le casque on aurait presque l’impression de se retrouver en face d’eux, amplis allumés. Pari réussi pour le batteur des BIR, chaque instrument sonne merveilleusement bien sans empiéter les uns sur les autres. Et cerise sur le gâteau, Thibault Chaumont (Igorrr, Lana Del Rey ou encore It It Anita) sublime tout ça à travers un mastering aux petits oignons !
Bon, c’est bien, mais maintenant parlons un peu de la philosophie de cet album. Là où Ashamed proposait des compositions tantôt claires, tantôt obscures, Inner Battles donne l’impression de quelque chose de bien plus cohérent à travers ses 11 titres. Comme l’impression d’un voyage avec des péripéties d’une grande diversité.
On entre dans cet album avec un titre qui happera l’auditeur·ice dans une certaine forme d’urgence : The Other Hand. Ouais, les Mad Foxes ne disent pas bonjour. Mais peut être que la plus grande surprise viendra immédiatement au second titre avec Cold Water Swim. Une basse presque funk, une batterie qui groove pour deux accords de gratte modulés suivi d’un refrain hurlé noisy. Et voila qu’en moins de 7 min, le groupe donne le ton. On va retrouver le meilleur des éléments post-punk comme Metz, Idles ou Shame mais dans une soupe qui est unique dans le paysage rock. Compositions efficaces, originales avec un soupçon de virtuosité.
Virtuose ? Bien sûr, on n’est pas face à un groupe de math-rock ou de prog ultra technique pourtant chaque membre des Mad Foxes à la place d’exprimer son plein potentiel. Lucas déjà, dont le chant pourra en faire pâlir plus d’un. Refrain catchy, scream maitrisé à la perfection et mélodie surprenante (Gros coeur sur le refrain de YBNF qui résume bien ça). Arnaud à la basse, qui ne se limitera pas à la fondamentale. Au programme des lignes tantôt mélodiques, faisant presque office de seconde guitare, que d’autre lourdes au son gras. Et bien évidemment, Elie à la batterie, qui se permettra des rythmiques autant dansantes que d’autres plus immédiates. Ecouter Inner Battles c’est donc la possibilité d’alterner headbang et zouk, la preuve avec le morceau White Gloves.
Bref, poursuivons le voyage. Je le disais, les compositions de Mad Foxes se veulent immédiates, faites pour le live, mais des libertés sont permises notamment à travers quelques arrangements inédits dans la discographie du groupe. Percussions, choeurs et couches de guitares supplémentaires seront là pour gratiner la production déjà bien léchée sans pour autant dénaturer le propos du trio.
Des libertés également prises dans la composition avec son diptyque Sudden donnant encore plus de poids au lore proposé dans cet album. Deux morceaux au même thème mais arrangés de façons différentes, l’un au trot avec des mélodies énigmatiques, l’autre au galop finissant en apothéose de sons et de hurlements. Et si le voyage a été ponctué de musiques furieuses (Hurricane), groovesques (Jungle Knives) ou minimaliste (Flashes) , il se termine par Ages au chant libérateur et aérien qui confirme une fois de plus la maturité du groupe.
C’est face à une telle richesse, efficacité et production que l’on est bien obligé de l’admettre : Inner Battles a fait mieux. Il a fait mieux sur tous les points et se permet d’être encore plus surprenant que son prédécesseur. Mad Foxes redéfini une fois de plus son rock et l’impose à tout le reste de la scène française avec une élégance notable.
C’est donc avec peut-être moins d’appréhension que l’on attend leur 4eme album !